Humanitude

Humanitude

L’être humain est un être de communication. Dans la philosophie de l’humanitude, nous définissons le soignant comme un professionnel qui prend soin d’une personne qui a des problèmes de santé.

  ·        Un des éléments fondamentaux de l’humanitude est la communication.

Lorsqu’un enfant arrive au monde, il n’est pas encore en humanitude, et sa mère, son père, les humains qui l’entourent vont l’y faire rentrer.

Il y a  trois piliers de la communication, le regard, la parole et le toucher qui permettent à l’enfant la construction de son identité.

– Le regard, d’abord, est le premier canal de mise en humanitude. Lorsque que l’on s’approche d’un enfant, les regards posés sur lui portent des valeurs, des sentiments, et répondent à des critères bien précis: Les qualités de ces regards sont l’amour, la tendresse, la fierté, la protection, l’appartenance, la reconnaissance…

Pour un patient, comment vivre quand on n’est pas regardé? Mais pour un soignant, un accompagnant, comment regarder la mort en face, l’agression sereinement, l’extrême vieillesse, image de ce que nous serons peut-être, dans les yeux? Avec les patients très atteints, très souffrants, mourants, déments agressifs… la réaction naturelle, simplement humaine, est de ne pas regarder.

C’est pour cela qu’il faut professionnaliser l’approche relationnelle, et « apprendre » à regarder. Qui sait aujourd’hui, parmi les soignants, que 60 % des patients atteints de la maladie d’Alzheimer ne verront plus sur les cotés, mais auront une vision en tunnel ? Savoir cela oblige à modifier notre approche, pour arriver de face, par le pied de lit et non du côté des barrières de lit, à se rapprocher, se mettre à niveau, et surtout nous oblige à prolonger les regards.

– La parole: Si le regard débute la relation d’humanitude, la parole l’accompagne immédiatement. La parole est constituée par 2 éléments, le ton et les mots.

La communication humaine obéit à certaines règles. L’émetteur (ici le soignant), envoie un message verbal (par exemple bonjour), vers un récepteur, le patient. Mais en même temps, l’émetteur attend une réponse, en temps réel, pour continuer sa conversation. Ce retour, le « feed-back », c’est à dire « nourrir en retour », est la source de l’énergie de communication.

Pour continuer une communication, il est donc normal, naturel d’attendre une réponse. La plupart du temps, la réponse est non verbale, c’est-à-dire une mimique, une simple expression de compréhension.

Le silence des soignants n’a rien à voir avec un manque de cœur, d’intérêt. Si le silence est naturel, la parole, elle, est professionnelle. Elle s’apprend, elle se travaille, elle s’entraîne.

Pour cela, nous avons mis au point une méthode de communication : L’auto-feedback

Dans une chanson, la musique est liée à la parole. Sifflez l’air, les paroles vous viennent en tête, dites le texte, la musique resurgit. Dans l’acte de soin, la musique est en fait représentée par les gestes des soignants.

Nous aurons des conversations de ce type: « Madame, je vais vous laver le bras (prédictif). Je vous soulève le bras, c’est le bras gauche, je vous savonne le dessus de la main, la paume, je vous lave l’avant-bras, je vous le lève etc (descriptif)… »

Cela paraît simple, mais cela nécessite un véritable entraînement. Si l’on rencontre souvent le prédictif, le descriptif n’est jamais réalisé naturellement. En décrivant ainsi les actes, la parole peut devenir automatique. En liant les mots aux perceptions du patient, le soignant fait aussi une véritable rééducation du schéma corporel.

Après avoir regardé et parlé, le toucher vient conclure la mise en relation, ce que nous appelons les « préliminaires au soin ».

Le toucher est le fondement du soin, il n’y a pas de soin sans toucher, il est communication non-verbale. Ce type de communication est sans doute le plus important. La sécurité des mobilisations, la douceur des manipulations sont indispensables au soignant comme au patient.

Pourtant se pose un double problème pour respecter ces priorités :

1° Le geste est inconscient à 98 %, d’après Laborit.

2° Plus un patient est « difficile », agressif, souffrant, lourd, plus nos gestes seront inadaptés, violents, en totale contradiction avec ce que nous voulons être, c’est à dire des soignants.

Tout cela est bien sûr involontaire, mais répond à des lois de la physique : la force est égale à la moitié de la masse multipliée par le carré de la vitesse, ce qui revient à dire que pour augmenter votre force, la masse étant invariable, vous augmentez la vitesse. Or la vitesse est incompatible avec la douceur. La forme de toilette choisie et les techniques associées doivent donc permettre de favoriser les communications non-verbales les plus riches et les plus douces.

Nous supprimerons les saisies en pince, qui non seulement font mal, provoquent des hématomes sur les avant-bras des patients âgés, et même parfois des plaies ; mais aussi sont très agressives sur le plan psychologique. La mémoire de ces attitudes est profondément inscrite dans notre cerveau limbique, siège de toutes les émotions, de tous les souvenirs liés à un état corporel.

Pour un patient très dégradé sur le plan intellectuel, comme un patient Alzheimer, un dément alcoolique ou autre, qui ne peut savoir qui vous êtes, et que vous venez lui faire du bien, le laver, l’habiller, le seul langage « vrai » est le langage du toucher. Et si par malheur vous lui soulevez le bras en le saisissant en pince, il risque de vous recevoir comme un agresseur.

Le toucher du soignant doit aussi solliciter l’autorisation corporelle du patient. Normalement, la conscience nous permet d’être prévenus chaque fois que l’on nous touche. Mais imaginez le bond que vous feriez, si dans la rue, un inconnu posait sans vous avertir la main sur vous. C’est pour éviter cette « surprise », que nous préconisons d’entrer sur le corps de l’autre par le bout des doigts, la paume se posant ensuite, et l’inverse pour quitter le corps du patient. Ce toucher très tendre est en lui-même porteur de la douceur, et favorise le lien entre les partenaires du soin.

L’humanitude, ce qui nous lie aux autres humains, est ainsi démontrée pour le toucher et la parole.

Texte inspiré de :  http://cec-formation.net.pagesperso-orange.fr/philohumanitude.html


 

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